Wednesday, September 4, 2013

-Chroniques d’un séjour sur Terre -







-Avant propos-

« Il y a un moment dans la vie d’un homme , où l’on éprouve le besoin de faire le tri dans ses souvenirs. »
Que les femmes ne m’en tiennent pas rigueur , cette remarque n’a rien de désobligeant  à leur égard et elle n’est certes pas réservée exclusivement à la gent masculine.Cela va sans dire…

Mais je jubilai à  l’idée de commencer l’écriture d’un livre par ce genre de phrase…
« Il y a un moment , dans la vie d’un homme »…Ah ,ah , ça claque !

On dirait le  genre de citation que l’on entend parfois dans les western …Où l’on voit le  héro ,charismatique mais vieillissant ,un brin fatigué par les épreuves de la vie , lever le nez au ciel …
 Il prend un léger appui sur sa winchester ; ôte son  Stetson , s’essuie le front  et ,   dos à ses compagnons il déclame  cette phrase absolue et définitive d’une voix  rocailleuse : « Il y a un moment  dans  la vie d’un homme… »

Certes , j’aurais  pu écrire :
« Il y a un moment dans la vie d’un homme et aussi dans la vie d’une femme , où l’on éprouve le besoin de… »
Mais cela aurait eu moins d’impact...

Avec le temps , certains souvenirs s’effacent , ou plutôt s’enfouissent si profondément qu’il est quasiment impossible de les déterrer…
D’autres se transforment un peu : on les modifie inconsciemment pour les rendre plus beaux ou plus spectaculaires, c’est selon…

Mais ce n’est pas très grave…Cette modification à pour but de retranscrire toute l’intensité de notre ressenti…Cette modification s’avère donc , selon moi , nécessaire…

Pourquoi écrire ces souvenirs  ?
Pour transmettre un vécu en communiquant des anecdotes , insignifiantes  le plus souvent.
Leur côté  futile n’est pas à négliger.
Une chose légère peut en dire long sur la personnalité d’une personne et donner beaucoup à qui sait écouter.
C’est souvent dans le détail des petites choses que se cache le merveilleux.

Mais pourquoi transmettre ces  broutilles me diriez-vous ?Quelle prétention !

Je répondrai que c’est probablement l’instinct de survie qui fait des siennes.
Que c’est pour ne pas mourir totalement , pour  continuer à vivre au travers de ceux qui les raconteront  un jour  peut-être, après nous…

Voici la première qui me revient en mémoire…
C’est la plus ancienne que j’ai à ce jour retrouvé.Elle était bien dissimulée dans la « souvenirothèque » poussiéreuse et chaotique de mon enfance.

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-La pelle et le ruisseau-


D’après les gros albums de photos que ma mère entretient avec une attention toute particulière , je dois avoir un peu plus d’un an…
Je suis le premier fils d’une famille de quatre enfants…Ma sœur n’arrivera que quatre ans plus tard , à mes 5 ans…

Je marche à peine…Nous habitons une modeste petite maison en provence, dans la campagne varoise.
Devant l’entrée , une  terrasse au bout de laquelle  coule un vaste fleuve dans lequel je lance allègrement mes jouets en plastique pour les voir flotter.

Mon fleuve devait être en réalité  une sorte  de point d’eau , un genre de flaque stagnante…

Quoi qu’il en soit , aujourd’hui rien de tout ceci n’existe plus que dans ce souvenir…

Tout a été rasé ,  goudronné , bouché…
Un magasin Picard « au prix défiant toute concurrence » trône à la place de mes  figuiers de jadis  et fait le bonheur des riverains qui n’ont jamais eu la chance de manger une figue « pègueuse » sur l’arbre.
(Pégueux : Du provençal , « collant »)

Cette  propriété ,mes parents louaient  à un certain « Galateau »…

Il n’évoquaient ce personnage  que par ce patronyme…Certainement son nom de famille…
Mon monde d’alors était assez restreint.Il y avait ma maman , mon papa , ma mémé , mes pépés , mon chat et « Galateau »…

Consonance rigolote…Un peu inquiétante…Mais qui était-il au juste ?
On habitait dans sa maison ?C’était la notre ou pas ?
J’avais alors une seule certitude : il n’était jamais bien loin , car mes parents en parlaient souvent et ce , de façon humoristique…

Je me souviens de ce chemin de terre qui longeait la maison…De ce ruisseau…

Je cours…Ou plutôt je trottine , je zigzague  sur ce sentier cabossé ,  le pas mal assuré …Le profond et immense ruisseau est là , il serpente sur ma droite , il m’effraie autant qu’il me fascine.
Il me fascine à tel point  que je   tombe dedans…

Si toute cette petite scène est floue ,  le souvenir de l’eau glacée  lui   en revanche , est encore  vivace…







Je vais me mettre   à pleurer  mais je n’ai pas encore ouvert la bouche  que déjà , je suis extirpé des crocs du reptile aquatique.

J’oublie la morsure du froid.

Une gigantesque pelle usée mais puissante  vient de me soulever dans les airs .
Mon sauveur  n’est  autre qu’un vieux   monsieur aux cheveux gris …Il est coiffé d’une casquette …Il me regarde sans rien dire.
Assis  sur mon séant trempé , tout au creux de  la langue d’acier  maculée de ciment ,  je pleure…

Mon premier souvenir s’arrête là…
Je vous avez prévenu , il n’est pas vraiment génial ,hein ?
Quoi que saugrenu.Je l’admets.

Ma mère me dit bien plus tard que la scène fut en réalité bien moins fantaisiste…

Mon père qui me surveillait de près  ce jour-là m’avait rattrapé avant que je ne plonge la tête sous l’eau…

Chère maman , pardonne-moi !
Je trouve ma version bien mieux !D’autant plus que je ne l’ai pas inventée , je te jure !Je l’ai vécu !!

Mais où suis-je donc aller chercher tout ça pour embellir à ce point la futile anecdote…Mon don de « Trouble-vue » y est il pour quelque chose ?

J’ai dû entendre mes parents plaisanter en racontant l’incident à leurs amis :
-« T’imagines si tu n’avais pas été là ?Gui-gui aurait pu se noyer ! »
-« Oh , le vieux Galateau n’est jamais bien loin , il l’aurait ramassé avec sa pelle !Ah ah ah !!! »










2 comments:

Anonymous said...

Hahaha !
C'est super ! Bravo !
Vivement la suite !

JL

Frézu said...

… "Comme des larmes dans la pluie"… tu a bien raison de laisser une trace qui est malgré toute passionnante et ferais de toi quelque chose d'immortel? on devrais prendre ton exemple…